Les Banques Centrales oublient leur prétendue indépendance et s'en prennent au protectionnisme



Un bulletin AFP nous dit : « Officiellement, les banques centrales ne font pas de politique. » Mais ajoute aussitôt : « Depuis plusieurs semaines, des banquiers centraux aux quatre coins du monde sortent toutefois de leur réserve, s'inquiétant d'une montée du protectionnisme »

Nous avons déjà commenté à diverses reprises le côté tendancieux, voire complètement mensonger, de divers représentants de ces banques centrales prétendument indépendantes sur les questions monétaires, sur lesquelles elles auraient pourtant dû être spécialement compétentes. La fausseté de leurs affirmations montre déjà que leur indépendance est plus que discutable, car il est difficile de croire que ces dirigeants soient tous incompétents : s’ils mentent ainsi à leur insu de leur plein gré c’est parce qu’ils y voient quelque avantage.

En ce qui concerne le protectionnisme, leur mauvaise foi n’est pas aussi évidente, car ce serait plutôt leur formation qui serait à remettre en cause. Les économistes ont été presque tous soumis pendant leurs études plus ou moins longues au même message : en dehors du libre-échange, du laissez-fairisme aurait dit M. Allais, point de salut, pas facile d’y résister.  Seuls quelques économistes hétérodoxes, presque tous classés, à tort ou pas, à gauche ont pu tenter résister à cette mantra ultra-libérale, comme la défunte J. Robinson ou le regretté M. Allais, pour ne pas citer B. Maris, victime de l’attentat de Charlie Hebdo, ou encore S. Keen ou dans un autre registre J. Sapir, sans oublier bien sûr les économistes marxistes pour lesquels le libéralisme serait par définition diabolique.

On aurait pu penser, cependant, qu’au lendemain de la guerre de 39-45 cette vision binaire : « libre-échange vs. protectionnisme », « bien vs.  mal », se serait transformée, puisque la charte onusienne de la Havane développait justement l’idée que les échanges entre les états-nations devait être équilibrés. C’est sans doute ce passage que nos banquiers centraux ont oublié, et c’est cet esprit de coopération internationale que des organisations internationales telles l’ONU ont elles aussi trahi.

Il est clair en effet que si cette charte de coopération était encore en vigueur, les 250 milliards d’excédent commercial de l’Allemagne, et les 50 milliards de déficit de la France, n’auraient pu se produire, l’esprit de la Havane étant de demander aux pays exportateurs d’aider les pays importateurs à rééquilibrer ces échanges, de tels déséquilibres étant insupportables à court moyen terme. C’est pourtant ces déséquilibres que les banquiers centraux veulent conserver, voire augmenter, au risque qu’ils dégénèrent en des conflits qui ne seraient pas seulement économiques. Et c’est contre cela et ces conséquences éminemment dangereuses que le programme présidentiel de Marine Le Pen veut lutter, en développant un protectionnisme intelligent et en mettant en place des écluses commerciales permettant de retrouver les équilibres que nous possédions encore au moment de l’instauration de l’euro.

Bruno Lemaire, économiste, ancien doyen associé à HEC

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